Le paysage se transforme, que ce soit de façon naturelle ou sous l’effet des activités humaines. Un récent rapport présente les modifications perçues positivement et les orientations à prendre pour améliorer encore l’attractivité paysagère.
Texte : Oliver Graf
Avant de se jeter dans l’Aar entre les communes soleuroises de Zuchwil et Luterbach, l’Emme traverse une région marquée par un fort développement urbain. En plus d’approvisionner en eau l’agglomération de Soleure et ses quelque 75 000 habitants, ce paysage fluvial constitue un espace naturel très prisé pour les activités récréatives. Dans le cadre d’un projet de renaturation achevé en 2020, l’Emme a vu son cours fortement remanié et son lit élargi. « Ces aménagements assurent une meilleure protection des riverains contre les crues, explique Roger Dürrenmatt, chef de projet à l’Office cantonal de l’environnement. Des habitats précieux pour la faune et la flore ont par ailleurs été recréés. Quant aux opportunités de loisirs, elles sont encore plus attrayantes. »
Des paysages aquatiques très appréciés
Si les mesures de revitalisation induisent immanquablement une modification du paysage, elles sont généralement bien accueillies : les résultats du programme de monitoring « Observation du paysage suisse » (OPS, voir encadré), publiés récemment, montrent que la majorité des participants à l’enquête consacrée à la perception du paysage remarquent et plébiscitent les mesures de revitalisation des cours d’eau initiées dans leur commune. La population suisse présente un fort attachement aux eaux : d’après les résultats du programme OPS, c’est la composante du paysage préférée des citadins à la saison chaude pour les activités de loisirs. Il faut dire que dans notre pays, près de 90 % des berges des cours d’eau et des lacs sont accessibles.
Qu'est-ce qui a changé ?
Mitage : Dans le village de Boécourt, dans le canton du Jura, la construction de l’autoroute A16 a particulièrement morcelé le paysage. La population est plutôt critique à l’égard de tels changements.
Le Murbach, un ruisseau près de Neudorf dans le canton de Lucerne, a été remis à ciel ouvert et revitalisé.
Une urbanisation qui s’étend
La population est encore plus attentive aux changements intervenant au niveau des infrastructures urbaines et des transports. Les évaluations – majoritairement négatives – concernent en premier lieu le développement de nouveaux quartiers et l’urbanisation aux dépens des paysages ouverts ou des espaces verts.
Le programme OPS montre que les surfaces d’habitat et d’infrastructure augmentent chaque année de 0,7 %. Si l’étalement urbain s’est ralenti (il progresse désormais moins vite que la croissance démographique), le mitage du paysage se poursuit, avec une artificialisation toujours plus visible des sols. Une tendance que Felix Kienast, coauteur de l’étude et chercheur au WSL, confirme : « Nos données satellite font apparaître un rétrécissement des espaces verts en milieu urbain d’environ 1 % chaque année. »
Appel à une prise de conscience de l’ensemble des acteurs
« Les gens sont globalement satisfaits de la qualité du paysage dans leur commune de résidence », indique Marcel Hunziker du WSL, qui collabore au programme OPS. Les évaluations concernant la beauté du paysage sont tout aussi positives, voire légèrement meilleures que lors de la précédente enquête. La singularité et l’authenticité du paysage ainsi que l’attachement au lieu restent particulièrement bien notés.
Pour Gilles Rudaz, de la section Politique du paysage de l’OFEV, il ne faut toutefois pas baisser la garde. Le paysage se modifie continuellement, les acteurs de ces changements sont nombreux : communes, prestataires touristiques, entreprises, exploitants agricoles, particuliers (utilisation des espaces naturels à des fins de loisirs). « Ce n’est que si tous les acteurs prennent en compte les qualités paysagères dans leurs décisions que nous pourrons préserver les atouts de nos paysages. » L’OPS contribue à la prise de conscience de la qualité des paysages.
Monitoring de l’état du paysage
Le programme « Observation du paysage suisse » (OPS) évalue à intervalles réguliers la qualité physique du paysage et la façon dont il est perçu par la population. Ces caractéristiques sont présentées dans le rapport « Évolution du paysage » publié par l’OFEV et l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL). Le programme OPS s’appuie sur les données de la Statistique de superficie (Office fédéral de la statistique, OFS) et de l’Office fédéral de topographie (swisstopo), des images satellite et l’enquête consacrée à la perception du paysage menée auprès de la population suisse (2090 participants en 2011 et 2020). Il permet à l’OFEV de remplir sa mission légale d’information du public sur l’état et l’importance de la nature et du paysage.
Évolution du paysage
Résultats du programme de monitoring Observation du paysage suisse (OPS). 2022
Informations complèmentaires
Dernière modification 10.05.2023