Du 26 au 31 août 2023 : les crues tiennent le Tessin et la Suisse orientale en haleine

06.09.2023 – Orages et précipitations abondantes ont mis fin à la vague de chaleur en Suisse le 25 août. Les importantes quantités de pluie tombées les derniers jours du mois d’août se sont traduites par une forte et brusque hausse des niveaux des lacs et des cours d’eau, qui ont débordé en maints endroits.

Kraftwerksablass aus Sufnersee
Le Rhin postérieur en crue le 27 août : vidange à la centrale hydroélectrique à la sortie du lac de Sufers.
© Philippe Gyarmati, BAFU

Dès la mi-août, la Suisse s’est trouvée aux prises avec une vague de chaleur persistante. L’absence de précipitations notables depuis un certain temps a provoqué des situations d’étiage dans presque toutes les régions du pays. De nombreuses stations de mesure installées sur les petits et moyens cours d’eau, notamment sur le Plateau et en Suisse occidentale, ont enregistré des débits d’étiage qui statistiquement ne s’observent que tous les deux à dix ans, voire plus rarement encore. Les niveaux des lacs tessinois ont également été très bas.

Le tableau a été tout autre en haute montagne. En effet, la forte fonte des glaciers a causé des variations de débit prononcées en cours de journée dans les bassins versants concernés. À titre d’exemple : malgré l’absence de précipitations, la Massa près de Blatten, en Valais, a momentanément atteint à la mi-août des débits correspondant au niveau de danger 2.

Quantités de pluie hors du commun

L’épisode pluvieux a commencé le 25 août. Une dépression centrée sur le golfe de Gênes a provoqué d’intenses précipitations. Celles-ci sont tombées principalement le week-end des 26 et 27 août et essentiellement sur le sud et l’est des Alpes, avant de s’étendre aux autres régions alpines et de gagner le nord lundi et mardi. Les précipitations ont été particulièrement abondantes dans le sud des Alpes et dans les Grisons. Les régions inférieures du Val Maggia et du Val Verzasca, le Locarnese, Biasca et ses alentours ainsi que la partie supérieure du Val Mesolcina ont fait état de cumuls de l’ordre de 250 à 300 mm, voire 400 mm localement, sur trois jours. La limite des chutes de neige ayant été très élevée, le gros des précipitations est tombé sous forme de pluie et n’a pas été emmagasiné sous forme de neige en altitude.

Une appréciation détaillée de cet événement pluvieux ainsi qu’une présentation des quantités de précipitations tombées sont proposées sur le blog de MétéoSuisse.

Crues dans le sud et dans l’est de la Suisse

La réaction des eaux aux précipitations abondantes a été rapide. Malgré les bas niveaux qu’ils affichaient auparavant, de nombreux cours d’eau du sud, du centre et de l’est de la Suisse ont vu leurs débits gonfler et atteindre les degrés de danger 2 à 3, voire les degrés 4 et 5 en Engadine (cf. carte).

En maints endroits, les stations de mesure de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) ont enregistré des débits ne survenant en moyenne que tous les deux à cinq ans. Pour certains cours d’eau, la période de retour a même été de l’ordre de cinq à dix ans, et plus élevée encore (cf. ci-après «Die höchsten Hochwasser-Messwerte an den BAFU-Messstationen vom 26. bis 31.08.2023»).

Toutefois, nonobstant les importantes quantités de pluie qui sont tombées, seul un petit nombre de stations de mesure a enregistré de nouvelles valeurs maximales pour le mois d’août ou même de nouveaux records absolus. Par le passé, les niveaux d’eau ont nettement plus monté après des précipitations comparables. C’est grâce à la situation d’étiage qui prévalait précédemment que les crues récentes n’ont pas davantage porté à conséquence.

Hausse du niveau du lac Majeur

Les importantes quantités de pluie et les forts débits enregistrés au Tessin ont fait nettement monter le niveau du lac Majeur. Avant l’événement, le lac affichait un niveau très bas pour la saison (cf. graphique). Puis, entre le 26 et le 29 août, son niveau a augmenté de 1,40 m.

Evolution annuelle Lago Maggiore-Locarno 2023
Forte hausse du lac Majeur : du 26 au 29 août 2023, le niveau a augmenté de 1,40 m et était début septembre supérieur à la moyenne à long terme de la période de comparaison 1981-2010.

Niveaux de danger 4 et 5 en Engadine

L’Engadine n’a pas échappé à la pluie. Étant donné que la limite des chutes de neige était très élevée là aussi, les précipitations sont tombées sous forme de pluie jusqu’en haute montagne, ce qui a causé une hausse forte et rapide des niveaux des cours d’eau. Près de Pontresina, l’Ova da Roseg a atteint le 28 août son débit maximal à 116 m3/s, ce qui correspond au niveau de danger 5. Il s’agit là d’un débit nettement plus élevé que le record absolu de 67,5 m3/s, enregistré en 1956. Les affluents accrus ont gonflé l’Inn de sorte qu’à la frontière avec l’Autriche, à Martina, dans les Grisons, le niveau de danger 4 a été atteint.

La crue du siècle pour le Rhin alpin ?

Les médias ont rapporté que le Rhin alpin avait débordé et qu’il avait atteint des valeurs que l’on n’avait plus observées depuis longtemps. Les statistiques de l’OFEV montrent cependant que le niveau du Rhin près de Diepoldsau avait monté fortement à plusieurs reprises ces dernières années. Les zones alluviales du Rhin, c’est-à-dire les plaines inondables longeant le cours d’eau, ont en effet été sous l’eau en 2016 et en 2019 ainsi que deux fois en 2020. Un débit de 1994 m3/s, tel qu’il a été mesuré le 28 août, y est observé tous les dix ans en moyenne. Le niveau atteint par le Rhin alpin au cours du dernier week-end d’août n’a donc rien de centennal. Néanmoins, les images qui ont circulé étaient impressionnantes, les chemins pédestres et les pistes cyclables le long du Rhin ayant été submergés en plusieurs endroits. Or c’est précisément à cette fin que ces zones alluviales ont été conçues : offrir au fleuve, en cas de crues d’une telle ampleur, la possibilité de déborder des deux côtés sans atteindre le milieu bâti.

Particularité du lac de Constance

Un phénomène particulier s’est produit lundi 28 août au lac de Constance. En raison de la vague de chaleur qui avait dominé la météo, l’eau du lac de Constance était très chaude. Les masses d’air froid qui ont ensuite balayé le lac en direction de la Suisse se sont réchauffées et ont absorbé beaucoup d’humidité. Puis, cette humidité s’est déversée sous forme de pluie sur la région appenzelloise dès lors que les nuages franchissaient la première chaîne de collines. Les régions adjacentes ont ainsi connu plusieurs épisodes de précipitations abondantes. En conséquence, la Sitter et la Goldach ont vu leurs niveaux considérablement monter et atteindre respectivement le degré de danger 2 et 3.

Peu de précipitations en Suisse occidentale

Fait remarquable, les quantités de précipitations différaient largement selon les régions. Le Jura et la Suisse occidentale ont été à l’abri des grosses précipitations, comme en témoigne le lac des Brenets, dans le canton de Neuchâtel. Son niveau est demeuré invariablement bas et la navigation est restée suspendue en raison de la situation d’étiage.

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Dernière modification 13.09.2023

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