Les épisodes de sécheresse se font de plus en plus longs, fréquents et intenses en raison des changements climatiques. Ils constituent un défi non seulement pour les différents écosystèmes, mais aussi pour les domaines tels que l’agriculture et l’approvisionnement énergétique. Autant de raisons qui ont mené au projet de mise en place d’un système de détection et d’alerte précoces en matière de sécheresse. À partir de 2025, la Confédération mettra à disposition cette nouvelle plateforme, où des informations relatives à la détection précoce de la sécheresse (monitoring et prévisions) et des alertes seront publiées pour toute la Suisse.
- Pourquoi informer sur la sécheresse ?
- À quoi sert cette plateforme ?
- Quelles sont les unités administratives qui collaborent à la réalisation de la plateforme ?
- De quels facteurs la sécheresse dépend-elle ?
- Quels sont les différents types de sécheresse ?
- Qui est affecté par la sécheresse ?
- Où trouver la plateforme sur la sécheresse et quels sont les contenus proposés ?
- Comment appréhender les épisodes de sécheresse à venir ?
Pourquoi informer sur la sécheresse ?
Le système national de monitoring, de prévisions et d’alerte en matière de sécheresse complètera les prestations actuelles de la Confédération en matière d’information et d’alerte sur les dangers naturels. Il concrétise la décision du Conseil fédéral du 18 mai 2022.
Pour cette raison, la Confédération a décidé d’intégrer la sécheresse en tant que menace dans le système d’alertes relatives aux dangers naturels et de publier des données de mesure, des prévisions ainsi que d’autres informations sur une plateforme en ligne dès 2025.
Les autorités cantonales et communales responsables, les secteurs concernés de même que la population pourront mieux se préparer aux périodes de sécheresse s’ils sont bien informés et si des alertes sont émises en temps voulu. Ils pourront s’organiser et prendre des mesures adéquates. Il s’agit, par exemple,
- dans les communes : de garantir l’approvisionnement en eau potable, de mettre des informations à disposition et d’émettre des recommandations à l’intention de la population quant aux comportements à adopter ;
- en agriculture : de prévoir et d’optimiser la gestion de l’irrigation ;
- pour la navigation : d’apporter des solutions de substitution pour le transport des marchandises sur le Rhin.
À quoi sert cette plateforme ?
Le système national de monitoring, de prévisions et d’alerte en matière de sécheresse complètera les prestations actuelles de la Confédération en matière d’information et d’alerte sur les dangers naturels. Il concrétise la décision du Conseil fédéral du 18 mai 2022.
La nouvelle plateforme Internet proposera dès 2025 des informations et des données relatives à la sécheresse. Elle pourra être utilisée non seulement à des fins de gestion des événements, mais aussi à des fins scientifiques. Elle permettra en outre à la population de mieux comprendre les conséquences directes et indirectes de la sécheresse et de saisir d’importantes corrélations.
Les alertes serviront à prendre des mesures à temps et, de ce fait, à éviter des dommages ou à en réduire l’ampleur.
Quelles sont les unités administratives qui collaborent à la réalisation de la plateforme ?
La sécheresse est un phénomène à multiples facettes. Cela implique que plusieurs offices fédéraux travaillent ensemble sur ce projet. Il s’agit de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), de l’Office fédéral de météorologie et de climatologie (MétéoSuisse) et de l’Office fédéral de topographie (swisstopo). Chacune de ces unités administratives couvre des thématiques différentes.
- L’OFEV chapeaute le projet. Il coordonne la réalisation de la plateforme d’information et de la chaîne d’alerte (en collaboration avec le Comité de direction «Intervention dangers naturels» LAINAT). Il est également responsable de la surveillance et de la modélisation des conséquences hydro(géo)logiques et sylvicoles. C’est à lui que reviendra la tâche de publier les alertes en concertation avec les autres offices fédéraux.
- MétéoSuisse est responsable de la mise en place et de l’exploitation du réseau de mesure de l’humidité des sols en Suisse. De plus, MétéoSuisse établit et optimise des indices relatifs à la sécheresse (p. ex. déficit de précipitations). Ces derniers servent au monitoring et aux prévisions météorologiques à long terme (quatre semaines).
- swisstopo est le centre national de la géoinformation. Il fournit, pour le monitoring de la sécheresse, des données satellitaires actuelles et historiques d’une résolution spatiale allant jusqu’à dix mètres. Il effectue notamment un monitoring du stress thermique des végétaux (mesure des effets néfastes de la sécheresse sur les plantes) avec MétéoSuisse à l’aide de satellites.
De quels facteurs la sécheresse dépend-elle ?
La sécheresse est un phénomène qui, contrairement à d’autres dangers naturels, se développe lentement. Pour beaucoup de personnes, elle évoque l’été et la chaleur. Or elle peut également survenir en hiver. Voici les facteurs dont la sécheresse dépend généralement :
- les précipitations, soit la quantité de pluie ou de neige qui tombe en un lieu donné ;
- l’humidité des sols, soit la quantité d’eau emmagasinée dans les sols ;
- les débits et les niveaux d’eau, soit le volume des lacs, des cours d’eau et des eaux souterraines.
La sécheresse se définit donc par une pénurie d’eau indépendamment des saisons.
Quels sont les différents types de sécheresse ?
L’Organisation météorologique mondiale distingue quatre types de sécheresse, dont les causes et les conséquences divergent.
Les périodes de sécheresse météorologique se caractérisent par des précipitations inférieures à la moyenne durant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Elles résultent d’anticyclones prolongés, qui maintiennent les masses d’air humide à distance.
Lorsqu’aucune précipitation ne se produit durant une longue période, l’humidité du sol diminue. Cela signifie que les plantes ont moins d’eau à disposition. Durant le semestre estival, les températures élevées provoquent une forte évapotranspiration, qui, combinée à de maigres quantités de précipitations, explique la faible humidité des sols. Ce type de sécheresse survient par exemple lorsqu’un hiver sec est suivi d’un printemps pauvre en précipitations, puis d’une période caniculaire en été.
On parle de sécheresse hydrologique lorsque le niveau des lacs, des cours d’eau et des eaux souterraines descend nettement en dessous de la moyenne pluriannuelle. La situation peut s’accentuer si l’on prélève de plus grandes quantités d’eau (p. ex. à des fins d’irrigation).
On qualifie de sécheresse socio-économique les épisodes durant lesquels les ressources hydriques ne permettent plus de couvrir les besoins en eau de la population et de l’économie.
Tous ces types de sécheresse se caractérisent par une situation dans laquelle l’eau disponible dans une région ne suffit pas à couvrir les besoins durant une longue période. Le critère de « quantité suffisante » dépend toutefois des secteurs et de la population. Il se peut, par exemple, que les sols d’une région soient déjà très secs, ce qui affecte les productions agricoles, mais que les quantités d’eau des lacs, des cours d’eau et des eaux souterraines de cette région soient suffisantes si bien que la pêche puisse (encore) être pratiquée et que les milieux aquatiques ne soient pas affectés.
Les sols : stockage et évapotranspiration
La multiplication et l’intensification des épisodes de sécheresse exercent une grande influence sur l’humidité des sols. Quand un ensoleillement et des températures supérieurs à la moyenne s’ajoutent à cela, les sols se dessèchent fortement. La nature des sols joue également un rôle déterminant. Par exemple, un sol sableux ne retient pas bien l’eau, tandis qu’un sol argileux ou organique peut la stocker sur de longues périodes.
Moins les sols contiennent d’eau, moins celle-ci ne peut s’évaporer à la surface. Par conséquent, l’atmosphère se réchauffe et s’assèche davantage, ce qui rend la formation de nuages plus difficile et diminue donc les épisodes de pluie. Dans ces conditions, les sols s’assèchent davantage.
Dans de pareils cas, une forte averse suffirait-elle à réalimenter un sol desséché ? Pas forcément, car un sol sec ne peut pas rapidement absorber l’eau de pluie. Au contraire, sur un sol dur et craquelé, l’eau s’écoule simplement sur la surface, ce qui peut entraîner des inondations et des crues soudaines. Ce phénomène est aussi appelé « ruissellement ».
Qui est affecté par la sécheresse ?
La sécheresse peut avoir des effets négatifs sur les aspects suivants.
Certaines sources d’eau potable peuvent tarir. Les pénuries peuvent déclencher des conflits d’utilisation des quantités disponibles entre l’approvisionnement en eau potable et les autres besoins, tels que l’irrigation agricole. L’eau d’extinction peut également venir à manquer. Ce problème est particulièrement redoutable, car les dangers d’incendie forestier augmentent durant les périodes de sécheresse.
Lorsque le volume qui s’écoule dans les cours d’eau est réduit en raison de la sécheresse, les centrales hydrauliques produisent moins d’électricité. De même, les centrales à accumulation voient leur production diminuer lorsque les lacs de barrage cotent moins haut.
En outre, les eaux se réchauffent plus rapidement lorsque leurs niveaux sont bas. Par conséquent, l’eau habituellement prélevée pour le refroidissement des centrales nucléaires est non seulement trop chaude, mais sa température augmente davantage en raison de l’activité des centrales.
Sous l’effet combiné de la chaleur et de la sécheresse, les sols perdent rapidement en humidité. Les plantes en souffrent et l’agriculture accuse des pertes ou perd parfois des récoltes entières (dessèchement, récoltes précipitées de semences encore insuffisamment développées, végétaux malades, etc.). Lorsqu’il ne pleut pas, il est possible d’irriguer les sols asséchés. Cependant, de telles interventions ont pour conséquence de baisser le niveau des eaux (souterraines). Elles ne sont donc pas toujours judicieuses d’un point de vue environnemental et peuvent entraîner d’autres problèmes, en particulier quand les niveaux sont déjà très bas à cause de la sécheresse.
Dans les cas les plus graves, il peut arriver que du bétail doive être abattu en urgence, car les quantités de nourriture et d’eau d’abreuvement à disposition seraient insuffisantes (à moins d’en acheter). Ce sont avant tout les alpages qui sont particulièrement concernés par ce type de pénuries.
Les pertes de récoltes et de bétail ont non seulement des conséquences du côté des producteurs, mais aussi du côté des consommateurs : quand l’offre de denrées alimentaires diminue, les prix augmentent.
Les pénuries d’eau font également souffrir les arbres. Affaiblis, ces derniers poussent plus lentement et donnent moins de fruits, voire n’en donnent plus. Sous l’effet d’un long épisode de sécheresse, les feuilles peuvent perdre leurs couleurs et, tout comme les épines, tomber prématurément. Par ailleurs, les arbres deviennent plus vulnérables aux infestations par des insectes tels que les bostryches. Les cimes, voire les arbres entiers, peuvent mourir à cause du manque d’humidité. Les chutes de branches et les arbres qui s’abattent représentent un danger réel pour les promeneurs. De plus, une forêt affaiblie est une forêt qui perd sa fonction protectrice contre les dangers naturels. La sécheresse crée davantage de masse combustible en forêt (matériau inflammable), ce qui augmente le risque d’incendie.
La baisse des niveaux d’eau (étiage) nuit au transport par bateau de personnes et de marchandises. Ce problème peut aussi affecter la régularité de la navigation de loisir. En situation d’étiage, la navigation du Rhin, qui revêt une grande importance en Suisse pour l’importation et l’exportation de marchandises, peut être fortement affectée (vitesse de navigation et/ou capacité de chargement réduites). Dans le pire des cas, elle doit être suspendue. Ce n’est pas sans conséquences pour le commerce et l’approvisionnement économique du pays (pénuries de denrées alimentaires pour les animaux, d’huiles et de graisses végétales, de carburants, etc.).
La sécheresse nuit sévèrement à certains écosystèmes et peut même s’avérer mortelle pour certaines espèces. Les forêts et les écosystèmes qui dépendent de l’eau sont particulièrement mis à mal en cas de longue période de sécheresse. Les eaux voient alors leur niveau baisser et leur température grimper. Sous cet effet, la teneur de l’eau en oxygène diminue et la concentration d’éventuels autres polluants augmente. Ces phénomènes sont des facteurs de stress potentiellement mortels pour les poissons.
En cas de sécheresse, les arbres dépérissent plus facilement, ce qui menace non seulement la biodiversité, mais aussi les êtres humains, leurs conditions de vie et leurs biens matériels, du fait des incendies de forêt et de l’affaiblissement de la fonction protectrice des forêts, par exemple.
Dans les eaux souterraines, les teneurs en nitrates et en produits phytosanitaires, qui proviennent principalement de l’agriculture, sont moins diluées en période de sécheresse. Il en va de même pour les eaux usées déversées.
Lors d’épisodes de sécheresse, les réserves d’eau diminuent généralement (baisse des niveaux des lacs, des cours d’eau et des eaux souterraines) si bien que les ménages peuvent se trouver confrontés ponctuellement à des situations de pénurie d’eau. En situation aiguë, les communes peuvent appeler à réduire l’utilisation de l’eau (p. ex. pour l’arrosage des jardins et des pelouses ou pour le lavage des voitures). Lorsqu’il faut définir qui a le droit de consommer quelle quantité d’eau, des conflits peuvent survenir entre les différents utilisateurs et groupes d’intérêts.
Une végétation sèche accroît le risque de feux de forêt, de campagne ou de broussaille. En zone habitée, il existe ainsi un risque pour les personnes et les biens matériels présents. Lorsque plusieurs incendies sévissent en même temps, les ressources disponibles pour lutter contre le feu peuvent manquer (véhicules d’extinction, hélicoptères, pompiers).
Si de fortes pluies s’abattent après une période de sécheresse, des inondations risquent de se produire localement. Comme l’eau ne pénètre pas assez rapidement dans les sols asséchés, elle ruisselle en grandes quantités sur la surface (comme expliqué dans l’encadré « Les sols : stockage et évapotranspiration »).
Où trouver la plateforme sur la sécheresse et quels sont les contenus proposés ?
La nouvelle plateforme de la Confédération consacrée à la sécheresse sera disponible en ligne dès le printemps 2025. Elle sera accessible à l’adresse www.secheresse.admin.ch et proposera des informations historiques, actuelles et prospectives (prévisions sur quatre semaines) au sujet des précipitations, des débits, de l’humidité des sols, des eaux souterraines, des facteurs de stress pour les végétaux, etc. La plateforme servira à la publication d’alertes en cas de période de sécheresse prolongée.
Elle sera constamment développée et améliorée dès son lancement.
La plateforme s’inspire de drought.ch de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL). Ce site continuera de fonctionner en tant que plateforme de recherche expérimentale après le lancement de la nouvelle plateforme consacrée à la sécheresse.
Comment appréhender les épisodes de sécheresse à venir ?
Les épisodes de sécheresse peuvent avoir des conséquences très différentes selon les régions. Le cas échéant, il est donc important de s’informer à temps et de suivre les recommandations des autorités locales. Vous trouverez de plus amples informations sur le comportement à adopter sur le portail des dangers naturels de la Confédération dès le printemps 2025.
S’agissant du long terme, il est indispensable d’établir des stratégies anticipatives pour l’adaptation aux périodes de sécheresse, qui se font de plus en plus fortes et fréquentes. Voici quelques exemples d’adaptation.
- Les agriculteurs peuvent miser sur des cultures de plantes moins gourmandes en eau. Par ailleurs, l’optimisation des méthodes d’arrosage constitue un levier d’action. À l’aide de capteurs mesurant l’humidité du sol, il est possible de savoir quelle quantité d’eau est nécessitée et à quel moment, afin d’arroser les cultures de manière ponctuelle et uniquement lorsqu’il le faut. Ces systèmes permettent d’économiser de l’eau.
- Le secteur de l’approvisionnement en eau peut se renforcer pour mieux fonctionner en période de sécheresse, principalement en optimisant les réseaux. Pour ce faire, les fournisseurs peuvent s’entendre sur des plans d’urgence définissant des stratégies communes à suivre en cas de sécheresse extrême (telles que la modification temporaire de la répartition des ressources en eau, p. ex.). Une telle solution requiert toutefois des investissements en matière d’infrastructure (construction de réseaux de conduites interrégionales). Un système en réseau offre une certaine flexibilité et assure une compensation locale en cas de pénurie. Ainsi, l’approvisionnement en eau potable est garanti même lorsque les conditions sont plus difficiles.
- Dans le secteur sylvicole, il s’agit de renforcer la résilience des forêts afin qu’elles restent saines et continuent de fournir leurs prestations (de fourniture de bois, de protection contre les dangers naturels, en tant que milieu naturel, etc.). Le secteur pourrait notamment planter plus d’essences d’arbres qui résistent mieux à la sécheresse.
Comme c’est souvent le cas : mieux vaut prévenir que guérir. Au lieu de nous adapter à des épisodes de sécheresse toujours plus longs et plus fréquents, nous pouvons mettre en place des mesures de protection climatique (p. ex. afin de réduire les émissions nocives pour le climat) dans le but d’atténuer l’intensification des épisodes tant de sécheresse que de précipitations abondantes, de freiner la hausse des températures et de lutter contre la raréfaction de la neige.
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Dernière modification 19.08.2024