Système financier durable

La pression exercée par nos modèles de production et de consommation dépasse les limites de la planète : changements climatiques, pénuries d’eau, perte de biodiversité, etc. en sont les conséquences. Si nous voulons assurer le fonctionnement des écosystèmes pour les générations actuelles et futures, nous devons impérativement opérer une transition rapide de notre économie réelle vers une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources. Le secteur financier peut accélérer cette transition.


Finance durable

Un système financier est dit « durable » lorsque ses décisions de financement et d’investissement favorisent une activité économique qui tient compte du caractère limité des ressources non renouvelables et de la capacité de régénération des ressources renouvelables. Pour renforcer le développement durable et exploiter les débouchés commerciaux offerts par celui-ci, les acteurs du système financiers doivent systématiquement prendre en compte les facteurs de durabilité dans leurs décisions de financement et d’investissement. Ces facteurs dits « ESG » (environnementaux, sociaux et de gouvernance) sont, par exemple, les émissions de CO2, la consommation d’eau, l’exclusion du travail des enfants, l’efficacité des structures de gestion garantissant une bonne gouvernance d’entreprise, etc.

Dans les milieux financiers, le préjugé selon lequel la durabilité se ferait au préjudice du rendement est tenace. Or des études (Université d’Oxford et Arabesque, Université de Hambourg et Deutsche Asset Management, Université de Genève et Swiss Finance Institut) prouvent que les placements durables sont au moins aussi intéressants que les formes traditionnelles d’investissement.


Signaux forts de la communauté internationale

L’année 2015 a été marquée par des avancées majeures de la communauté internationale en faveur du développement durable et de son financement :

  • Agenda 2030 : adoption de 17 objectifs de développement durable (ODD) de portée universelle lors du Sommet sur le développement durable à New York ;
  • Accord d’Addis-Abeba : programme d’action sur le financement du développement durable ;
  • COP 21 : signature de l’Accord de Paris, par lequel la communauté internationale a notamment convenu de rendre les flux financiers compatibles avec un profil d’évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques (art. 2.1.c).

Intérêt des instances financières internationales

Le financement des objectifs de développement durable et des objectifs climatiques de Paris ne pouvant être assuré par des sources publiques seules, il est impératif de mobiliser des capitaux privés. L’orientation du système financier vers ces objectifs revêt donc une importance croissante, ce qu’ont bien compris les instances financières internationales :

  •  en 2016, sous la présidence chinoise, le G20 a fait du développement de la finance verte un thème prioritaire et mis en place à cet effet un groupe d’étude (G20 Green Finance Study Group, GFSG) dans le cadre de son volet financier ;
  • le GFSG est reconduit en 2017, sous la présidence allemande ;
  • le groupe de travail sur le reporting financier des risques liés au climat (Task Force on Climate-related Financial Disclosures, TCFD) du Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board, FSB), piloté par l’industrie, a publié des recommandations relatives à la communication volontaire et à la présentation des risques financiers liés au climat ;
  • les initiatives d’organisations internationales comme le FMI, l’OCDE et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) dans le domaine de la finance durable se multiplient.

Biodiversité et marchés financiers

Dans le monde entier, la biodiversité accuse un fort déclin. Si, au titre des principales causes, on compte certaines activités économiques particulièrement préjudiciables, les établissements financiers exercent eux aussi un impact négatif sur la biodiversité lorsqu’ils financent des activités qui portent atteinte à cette dernière.

Étant donné que, d’après des estimations, la moitié de la production économique mondiale dépend moyennement à fortement de la biodiversité, le recul de cette dernière expose tant l’économie réelle que le secteur financier à des risques énormes. Le Forum économique mondial considère dans son rapport Global Risks Report la perte de biodiversité comme l’un des risques environnementaux majeurs. Celle-ci s’accompagne toujours d’une baisse des prestations écosystémiques essentielles. Les entreprises tributaires, par exemple, de sols fertiles, de la pollinisation par les insectes ou encore de l’approvisionnement en eau doivent ainsi directement faire face aux risques qui découlent de la perte de biodiversité. Il en va de même pour les établissements financiers qui investissent dans ces entreprises.

Grâce à l’outil ENCORE, les établissements financiers peuvent intégrer des aspects de biodiversité dans leurs décisions d’investissement. Les flux financiers sont ainsi orientés de manière ciblée vers des activités économiques contribuant à la biodiversité plutôt que vers celles qui l’appauvrissent. Les objectifs définis par la Convention sur la diversité biologique visant à garantir la biodiversité servent d’orientation à ce titre.  

La première version d’ENCORE, mise en place avec le soutien du Secrétariat d’État à l’économie, a permis d’identifier les risques pour les activités économiques qui découlent de la perte de biodiversité. Dans le cadre de la deuxième version de l’outil, élaborée avec le soutien de l’Office fédéral de l’environnement, ces risques se voient aujourd’hui complétés par un volet consacré aux effets sur la biodiversité. Ainsi, divers indicateurs montrent dans quelle mesure un portefeuille d’investissements porte atteinte à la biodiversité ou, au contraire, est compatible avec les objectifs internationaux en la matière. En conséquence, des mesures concrètes peuvent être prises pour rendre un portefeuille plus respectueux de l’environnement. Issu d’une collaboration avec de grandes banques et des assurances, l’outil est librement accessible afin que les établissements financiers en Suisse et dans le monde puissent davantage s’axer sur les objectifs internationaux de biodiversité.  


Eau et marchés financiers

Quelque 90 % des catastrophes naturelles sont liées à l’eau. La crise de l’eau et les risques y afférents s’aggraveront en raison des changements climatiques, de la demande accrue en eau douce et de la croissance tant de la population que des revenus. Les effets se feront ressentir sur la société civile, les entreprises privées et les investisseurs. 

Nous constatons déjà que des actifs importants sont devenus irrécupérables en raison de leur exposition à différents types de risques liés à l'eau. Ce rapport présente des exemples spécifiques d'échouage d’actifs qui se sont récemment produits dans quatre des secteurs les plus dépendants de l'eau : le charbon, le pétrole et le gaz, l'énergie ainsi que les métaux et les mines.

Les risques liés à l’eau sont indissociables d’autres risques environnementaux. Si ces risques ne sont pas gérés correctement, les dangers pesant sur le climat et la biodiversité pourraient rapidement augmenter. Par conséquent, lutter contre les risques liés à l’eau permet de réduire les dangers pesant sur la biodiversité ainsi que d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris et de la Convention sur la diversité biologique.

Si de nombreux investisseurs sont conscients des risques liés à l’eau, peu d’entre eux tiennent compte des effets à long terme de leurs investissements et décisions de financement sur la quantité et la qualité de l’eau ou s’impliquent à cette fin auprès des entreprises dans lesquelles ils placent des fonds. Or les investisseurs peuvent contribuer activement à la résolution de la crise de l’eau à large échelle.

Ce guide met l’accent sur la façon dont les investisseurs peuvent s’engager auprès des entreprises dans lesquelles ils placent des fonds pour que l’objectif de développement durable 6 soit atteint en garantissant la sécurité des ressources hydriques dans les bassins.

Garantir la sécurité des ressources hydriques dans les bassins consiste à promouvoir la gestion durable de ces ressources de sorte que tous les utilisateurs disposent d’eau douce en qualité et en quantité suffisantes à long terme.

The ‘understand-design-act’ framework for basin water security
Figure 1 : Le concept « comprendre – concevoir – agir » pour la sécurité de l’eau

La publication est conçue comme un guide pratique indiquant les différentes étapes à suivre, proposant des études de cas et présentant les ressources nécessaires (instruments, méthodologie et sources des données, notamment).

Four principles of basin water security
Figure 2 : Les quatre principes pour la sécurité de l’eau

Le rapport technique de Southpole peut également se révéler utile pour identifier les risques liés à l’eau.


Promesses de la numérisation

Les nouvelles technologies financières (Fintech) font partie de la numérisation (Big Data, Internet des objets, Blockchain et intelligence artificielle) et permettent une intégration plus rapide, plus large et moins coûteuse des critères environnementaux dans les décisions de financement et d’investissement. La Fintech permet en effet d’utiliser des données environnementales pertinentes, fiables, actuelles, ciblées et librement accessibles pour analyser, modéliser et évaluer les risques et les avantages liés à l’environnement. Dans son rapport « Fintech and Sustainable Development. Assessing the Implications », paru fin 2016, « UNEP Inquiry into the Design of a Sustainable Financial System » voit dans la Fintech l’occasion d’accélérer l’intégration de la finance et de l’économie réelle et d’améliorer la transition vers une économie préservant les ressources naturelles.


Implication de la Suisse dans « UNEP Inquiry into the Design of a Sustainable Financial System »

« UNEP Inquiry into the Design of a Sustainable Financial System » (UNEP Inquiry ; L’enquête sur la conception d’un système financier durable) lancée en 2014 par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a mis en lumière le défi historique que représente le financement de la transition vers une économie préservant les ressources naturelles. L’objectif de cette enquête était de recueillir des exemples de bonnes pratiques et des expériences de différents pays, ainsi que de définir des stratégies pour un meilleur alignement du système financier sur les besoins du développement durable.

Le rapport final « Le système financier dont nous avons besoin : alignement du système financier sur le développement durable » a été présenté le 8 octobre 2015 à Lima dans le cadre des Assemblées annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Il présente un cadre d’action qui systématise les pratiques prometteuses de différents pays. Les travaux de l’enquête du PNUE constituent ainsi une bonne base pour les étapes ultérieures de l’élaboration d’un système financier durable sur le plan tant national qu’international.

L’OFEV a soutenu l’enquête du PNUE. Pour réaliser le travail de fond en Suisse, le Swiss Team for the UNEP Inquiry a été créé, regroupant des experts de la Confédération, du secteur financier, de la communauté scientifique et des organisations non gouvernementales. Ce groupe d’étude s’est notamment penché sur deux questions centrales de l’enquête du PNUE :

  • Pourquoi le nombre d’investissements en faveur de la transition vers une économie verte demeure-t-il insuffisant au regard de l’abondance de fonds privés internationaux ?
  • Quelles sont les conditions-cadres nécessaires pour créer un système financier au service d’une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources naturelles ?

Les premiers résultats du groupe suisse d’experts ont été présentés le 6 mai 2015 lors du symposium « Swiss Finance in a changing world » à Berne. Très bien accueillis par le secteur financier international et national, ils ont été repris pour les travaux du rapport final de l’enquête du PNUE.

Le groupe suisse d’experts a en outre élaboré des propositions pour une feuille de route vers un système financier durable en Suisse, incluant vingt mesures. Ce rapport a été présenté le 14 juin 2016 à l’occasion de l’assemblée annuelle de Swiss Sustainable Finance.

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Dernière modification 07.07.2022

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